CPES.CAAP
Classe Préparatoire aux Etudes Supérieures
Classe d'Approfondissement en Arts Plastiques
Lycée Simone Veil
LES CONFÉRENCES
LEXIQUE
Pittoresque : ce qui mérite une peinture. Se dit d’un paysage dont la vue est déjà en quelque sorte pensée en termes de peinture, donc d’image.
Paysage : construction mentale, différente de l’idée globale de la nature
Peindre sur le motif : se déplacer et peindre le spectacle de la nature en direct, sur place, c'est-à-dire en plein air, ce qui est radicalement différent de la peinture d'atelier.
Æsthesis: se rapporte à la sensation, aux choses perçues, éprouvées par les sens et non seulement décrites comme choses existantes. Il s’agit d’une discipline philosophique qui à partir du XVIII° est pensée en tant que telle et se rapporte au monde de l’art.
Sublime : notion qui est développée en philosophie par Edmund BURKE, puis par KANT, et qui désigne ce que la traditionnelle échelle du plus ou moins beau est incapable de saisir. Les romantiques vont user de cette notion tout particulièrement pour exprimer des sentiments paroxystiques devant le spectacle de la nature quand il est extrême. Incendies, avalanches, scènes parfois douloureuses, voire effrayantes mais qui sont goûtées au-delà de l’idée du Beau.
Salon des Refusés : Exactement deux cents ans après que Colbert, ministre de louis XIV ait crée le Salon (en relation avec la tradition de l’art académique), en 1863, Napoléon III décida de créer exceptionnellement un Salon des Refusés devant les scandales à répétition apparus avec les innovations des grands peintres du IX° comme Gustave Courbet ou Édouard Manet. Ces premières manifestations d’un art devenu « moderne » sont très mal jugées par la critique et le Salon officiel. Les Impressionnistes essayeront de réclamer un droit d’exposer en faisant appel à ce principe de « Salon des Refusés » mais cela leur sera …refusé. De fait , ils ne trouveront refuge en 1874, date de leur première exposition collective, chez Nadar, dans son atelier de photographe.
École de Barbizon : représentée par Camille Corot, Jean-François Millet et Théodore Rousseau, elle symbolise cette première décision de quitter les ateliers parisiens pour aller peindre la nature sur le motif, avant les impressionnistes. La seule nature (à l’exception de Millet) devient leur sujet, bien que cela soit particulièrement déconsidéré dans les Salons de peinture officiels à Paris. L’appellation « École de Barbizon » est apparue tardivement, en fait après que les peintres soient morts.
Eugène Chevreul : chimiste (1786-1889) qui publiera en 1839 De la loi du contraste simultané des couleurs (…), théorie des couleurs et de leur perception qui permettra aux peintres de la fin du XIX° de penser le rôle des couleurs sur la toile de manière libre. Exemple : les ombres ne seront plus traitées en noir comme le réclamait l’Académie de peinture, mais colorées, parfois en bleu, en violet …
Le vrai sujet de l’impressionnisme : L’observation des phénomènes atmosphériques, des variations lumineuses du matin au soir, de l’hiver à l’été et des nuances colorées que ces phénomènes produisent : voilà le vrai sujet de la peinture impressionniste, plus encore que les paysages eux-mêmes.
Différences avec le paysage académique : La principale différence entre le paysage tel qu’il est accepté par l’Académie et le paysage vu par les Impressionnistes réside dans le fait que les impressionnistes refusent toute allusion historique, héroïque, mythologique et donnent à leurs paysages l’aspect de simples vues, ordinaires, sans intérêt "pittoresque" et donc sans la dimension spectaculaire chère aux peintres romantiques avant eux.
La méthode des impressionnistes :
- Se rapprocher physiquement des motifs à peindre et travailler sur place le plus possible pour ne pas trahir les impressions perçues.
- Observer les effets produits sur la nature par les jeux de lumière changeant selon les heures et les saisons.
- Utiliser une palette de couleurs libérée des conventions académiques et se fier à la perception de l’œil.
- Refuser les surfaces de peintures larges et leur préférer une juxtaposition de touches rapprochées, orientées de manière répétitive, laissant parfois plus ou moins apparaître le support de la toile.
- Utiliser ni vernis, ni surface lisse et uniforme comme l’exigeait l’Académie, mais au contraire un jeu de variations colorées travaillé par la matière de la peinture, parfois avec une relative épaisseur.
Le paradoxe de l’impressionnisme : L’observation approfondie, détaillée de la perception de la réalité, changeante sans cesse par les jeux de lumière, poussent les peintres comme Claude Monet à s’éloigner de l’imitation des seules apparences des choses. Cela le conduit progressivement vers les limites de la figuration, s'engageant dans une forme d'abstraction issue de cette immersion colorée et lumineuse dans la nature. La série des Ponts japonais de son domaine de Giverny illustre bien cette progression de sa peinture entre les années 1890 et la veille de sa mort en 1924.
Le rôle du dessin : Traditionnellement attaché à la traduction d'une idée (le dessein) par la description des limites, des contours et de la structure des choses observées, il est avec l'Impressionnisme , relégué au second plan. La couleur et la matière picturale passent au premier plan, elles qui étaient considérées par l'institution comme vecteurs des émotions et devant nécessairement être subordonnées à l'idée, première et principale. L'académie voyait en l'usage du dessin, la garantie d'un respect fidèle à l'Idée, aux apparences aussi, à la Forme qui devait primer sur la couleur et ses variations. Les Impressionnistes inversent cette valeur et travaillent à même la couleur, traductrice des effets de lumière qu'ils observent.
L’évolution des techniques et son rôle dans la radicalisation de la peinture impressionniste et postimpressionniste :
- Le développement des moyens de transport modernes incite les peintres à quitter la ville.
- L’invention du tube de peinture rend le peintre plus libre de ses mouvements et lui permet de travailler en dehors des ateliers. La commercialisation du matériel destiné aux peintres permet un développement des pratiques de plein air.
- L’invention et le développement de la photographie donne une raison de plus aux peintres de ne plus imiter de manière strictement réaliste le paysage car la photographie s’en charge à présent.
- Les théories sur la couleur, publiées entre le XVIII° et le XIX° siècles, accordent de plus en plus de place à la perception à la fois exacte et sensible des phénomènes lumineux. D’abord le poète allemand Goethe (1749-1832) avec son Traité des couleurs de 1808 puis le chimiste français Chevreul (1786-1889) avec son célèbre ouvrage publié en 1839 : De la loi du contraste simultané des couleurs.
La notion de sujet : Le cas de Monet est exemplaire. Partant de l’observation d’un même paysage soumis à des variations lumineuses dues aux heures et aux saisons, il va progressivement se rapprocher de son sujet, qui n’est ni un paysage spécifique, ni une chose particulière au sein de ce paysage. Il a inventé au sens propre ce paysage, au milieu duquel il vit, il l’a façonné année après année et observe analyse les effets atmosphériques, les infinies nuances chromatiques qui se produisent sous l’action des lumières changeantes au gré des heures et des saisons. Les Meules montrent bien les limites de la notion de sujet : ni intérêt géographique, géologique, historique, encore moins mythologique, ni spectacle … Il s’agit d’un support pour variations lumineuses et donc chromatiques. Les meules portent comme une peau, un écran, les changements incessants captés par l’œil de Monet et transcrits en peinture.